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Myopathies de Duchenne et de Becker : premier pas vers une thérapie génique

Le premier essai de phase I de thérapie génique pour les myopathies de Duchenne et de Becker vient de démontrer qu'il est possible d'exprimer la dystrophine à partir d'une molécule d'ADN injectée directement dans les muscles des malades.

A l'occasion du congrès annuel de la Société américaine de thérapie génique, les résultats du premier essai de phase I de thérapie génique pour les myopathies de Duchenne et de Becker sont rendus publics. Ils sont très encourageants puisqu'ils montrent qu'il est possible d'exprimer, dans les muscles des malades, une version fonctionnelle du gène dont la déficience est à l'origine de ces deux pathologies.

Les myopathies de Duchenne et de Becker sont deux maladies musculaires génétiques causées par la mutation du gène codant pour la dystrophine. Il n'existe actuellement aucun traitement curatif pour ces deux pathologies gravement invalidantes. La thérapie génique représente cependant un espoir important pour les patients atteints par ces dystrophies musculaires. En effet, le transfert d'un gène fonctionnel dans leurs cellules musculaires pourrait théoriquement permettre aux malades de synthétiser la dystrophine qui leur fait défaut.
La faisabilité d'une telle stratégie curative vient d'être confirmée par l'essai clinique de phase I mené au sein de l
'Institut de myologie et dans le service de médecine interne du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, sous la responsabilité des Prs Michel Fardeau et Serge Herson.
L'essai, commencé à l'initiative de l'Association française contre les myopathies (AFM) en partenariat avec la société Transgene et grâce aux fonds recueillis par le Téléthon, a consisté en l'administration à des malades d'une molécule d'ADN contenant une version fonctionnelle du gène de la dystrophine humaine. Le but premier de l'expérience n'était pas de soigner les patients, mais de démontrer qu'il était possible d'obtenir une expression de
la protéine chez les malades, via un gène exogène. De plus, cet essai permettait de s'assurer de l'absence de toxicité et de rejet immunitaire de la protéine fabriquée à partir de l'ADN exogène.

Un plasmide injecté dans les muscles

La molécule d'ADN exogène qui porte le gène « médicament » codant pour la dystrophine a été conçue par la société Transgene. Il s'agit d'un plasmide (une petite molécule d'ADN circulaire) capable de se multiplier dans les cellules humaines. Ce plasmide a été administré aux malades directement par injection intramusculaire.
Les neufs patients qui ont participé à l'étude ont été répartis dans trois groupes. Les sujets du premier groupe ont reçu une injection unique de 200 
μg de plasmide, ceux du deuxième groupe, une injection de 600 μg de plasmide et ceux du dernier groupe, deux injections de 600 μg chacune, à deux semaines d'intervalle. Les patients ont été inclus dans l'étude de manière séquentielle, un comité indépendant examinant les résultats de chaque sujet avant l'inclusion du suivant.
Quel que soit le protocole utilisé, la tolérance à l'administration du plasmide a toujours été excellente. Aucune réaction immunitaire contre le plasmide ou la dystrophine exogène n'a été détectée.
Trois semaines après la première (ou l'unique) injection, des fragments du tissu musculaire injecté ont été prélevés sur les patients. L'analyse de ces biopsies a permis de mettre en évidence que le plasmide injecté était
toujours présent dans les muscles des patients. De plus, une expression de la dystrophine a été détectée chez trois des six patients ayant reçu une seule injection du plasmide et chez les trois patients ayant reçu deux injections. Cette expression n'est observée que dans 1 à 10 % des fibres musculaires. Le niveau d'expression de la protéine est très faible, mais il augmente avec la quantité de plasmide injecté.
Il est donc maintenant établi qu'il est possible d'obtenir une expression locale de la dystrophine dans les muscles de malades atteints d'une myopathie de Duchenne ou
de Becker en leur administrant une molécule d'ADN qui comporte une version fonctionnelle du gène codant pour cette protéine.

Il faut encore un lourd travail de recherche

« C'est un premier pas vers une thérapie génique des myopathies de Duchenne et Becker », explique le Pr Michel Fardeau. Cependant, avant qu'un protocole thérapeutique effectif puisse être proposé aux malades, un lourd travail de recherche devra être réalisé. En améliorant la structure du plasmide, vecteur du transfert de gène, en augmentant les doses de plasmide administré et en modifiant la voie d'administration, les chercheurs espèrent notamment augmenter le nombre de cellules qui expriment la protéine « médicament » à la suite d'une injection d'ADN et le niveau d'expression de la protéine dans chacune de ces cellules.

Elodie BIET